FICTION A SUIVRE ...

Kaboul ...Thé !

Calais ... Café !

"Un Afghan à Calais"

Le récit

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romans au choix)

 _____

ROMANS AU CHOIX

NOTRE LANGUE EN PROSE

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Kaboul ... Thé ! Calais ... Café !

COMME AU BON VIEUX TEMPS DES FEUILLETONS ...

UGO VALENCE, Agent secret

NOTRE LANGUE EN VERS

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ESILELISE

  • ¤

Esilelise

   

NOUVELLES A LIRE

NOTRE LANGUE EN PROSE

  • ¤

Le français dans la mouise

  • ¤

De l'Antiquité à nos jours ...

Nouvelles d'hier et de demain, et même ... d'avant-hier et d'après-demain

Une petite ville d'histoireS

La more solitere du vieus moulin

NOTRE LANGUE EN VERS

  • ¤

JUSTE UN DERNIER VERS ... ET JE FINIS MON CHEMIN

  • ¤

Juste un dernier vers ... et je finis mon chemin

PIED A PIED

 

Le lézard
 
 
Un lézard
dort au soleil
et perd
un petit bout de queue
 
Un lézar
dort au soleil
et perd
un petit bout de queue
 
Un léza
dort au soleil
et perd
un petit bout de queue
                                     
Un léz
dort au soleil
et perd
un petit bout de queue
 
Un lé
mon Dieu
qu’il est laid et hideux
sans sa queue
 
Un l
qui perd la tête
ça n’a

ni queue ni tête

 

S.L.

 

Dis, Monsieur
 
  
 
Dis, Monsieur,
Fais-les rire
 
Dis, Monsieur,
Regarde leur sourire
 
Dis, Monsieur,
Ecoute leurs soupirs
 
Dis, Monsieur,
J’veux pas être sérieux
 
Dis, Monsieur,
Fais-en des élèves heureux
 
Tais-toi, mon âme,
Je suis prof.
 
 
S. L.

 

Oiseau de liberté

Hip ! Hip !

tu sautilles-tilles

Piaf

sur le bord de la gouttière

et tu cries

ton enfant tombé

à peine emplumé

du nid de tiges séchées

et ma main main minotaure

qui l’enserre

 

ne crie pas si fort

 

Piaf

 

c’est pour mieux le regarder

c’est pour mieux l’envier

cet oiseau-enfant

 aux ailes de liberté.

 

 

Je dédie ce poème

à l’oiseau ramassé

à peine

ce poème terminé

 

P

 

Pipi, pipi, pipi,

Popo, popo, popo,

Papa, papa, papa,

Pépé, pépé, pépé,

 

-i-i, -i-i, -i-i,

-o-o, -o-o, -o-o,

-a-a, -a-a, -a-a,

-é-é, -é-é, -é-é ,

 

Sans P la vie serait

A mourir de rire.

 

U

 

Un chameau

Et deux dromadaires,

Ca fait trois bossus !

 

Une ânesse

Et deux baudets

Ca fait trois têtus !

 

Un Petit Poucet

Et ses deux frères

Ca fait trois perdus !

 

Un gros

Et deux replets

Ca fait trois dodus !

 

Une pie

Et deux arondes

Ca fait trois langues bien pendues !

 

Mais un T

Et deux U

Ca ne fait qu’un vieux train : TU-U !

 

       S. L.

 

Fleuve Amour, bonjour

 

Tais-toi, Congo,

T’es pas beau !

 

T’as la Vistule

Qui se coagule

 

Et tu fais Mississipi

dans l’Ienisseï

 

Ton épouse la Garonne

joue l’Amazone

 

Avec le beau Danube

Qui titube

 

Il croit avoir la Moskova

Dans les bras

 

Et l’Escaut

C’est pas le Pô

 

Enlève la chemise

De la Tamise

 

Ah ! ce Rhin

Quel maintien

 

Il caresse sa demoiselle

La Moselle

 

Et perd le Nord

L’Amour est le plus fort

 

          S.  L.         

 

   Bonne lecture !

 

 

 
 


                                                                       
 

 

 

ME JOINDRE
NOUS SOMMES LE
Kaboul ... Thé ! Calais ... Café ! - Chapitre 18 - La débandade !
Kaboul... thé ! Calais... café !
 
 
Stéphane LEFEBVRE
 
 
Chapitre 18
     
La débandade !
 

Que choisir ? Et d’abord, reste-t-il vraiment une possibilité de choix ?

Les passeurs ont bien laissé entendre qu’ils étaient là, mais là où, car il semble bien qu’ils ne sont pas les derniers à déserter le camp. Bien entendu les policiers et les gendarmes sont déjà en train de dérouler dans toute la région le gigantesque filet de la chasse aux clandestins, aux migrants tout particulièrement et aux vilains oiseaux nettoyeurs qui les collent, les passeurs, pour qui les nouvelles ne sont pas vraiment encourageantes. Les temps sont durs et le travail ardu ! Une dizaine d’entre eux qui opéraient sur les camps de Norrent-Fontes, Téteghem et plus près de Calais, à Loon-Plage, se sont fait mettre la main au collet et ont été incarcérés. Ceux de Calais se savent identifiés pour la plupart et surveillés, jusqu’ici souvent et sûrement constamment maintenant. Seuls les plus téméraires, à moins qu’ils ne soient les plus talentueux dans la partie, se risquent encore à faire des affaires fructueuses, espérant être assez malins pour sentir, humer la rafle imminente et disparaître quand il en est encore temps.

Ce qui ne réussit pas toujours. Arrestation, garde à vue. La comparution est immédiate et la condamnation ferme, souvent autour d’un an de prison, moins si le passeur est encore inconnu des fichages, plus s’il fait dans la récidive. La mise en centre de détention a dans un premier temps le mérite de les éloigner des migrants qu’ils escortaient et qui vivent un profond ressentiment, surtout les majeurs, également placés en garde à vue et qui font dans la foulée l’objet d’un placement en centre de rétention administrative. Les migrants mineurs, après une audition simplifiée, sont remis en liberté, livrés à eux-mêmes et pour la plupart redirigés vers la jungle de  départ.

On parle toutes les langues sur le banc des prévenus au tribunal de grande instance de Boulogne. En français certes, mais encore en anglais avec un Britannique d’origine antillaise qui s’en sort avec une condamnation de deux ans de prison dont six mois fermes couverts par la détention provisoire et qui s’entend en anglais préciser qu’il bénéficie d’un sursis d’une année et demie, qu’il doit bien garder l’observation dans un coin de sa réflexion pour le cas où il lui viendrait la tentation de réitérer ses bêtises sur le sol français. A bon entendeur, salut !

Un autre parle en rien, ni anglais, ni arabe, inspiré par deux prévenus qui, lors d’un précédent jugement qui a bénéficié d’une inhabituelle publicité, ne comprenant pas les traducteurs et donc ce que les juges avaient à leur reprocher, ont été remis en liberté parce qu’ils ne pouvaient être légalement déférés devant un tribunal et jugés.

Il est Soudanais maintes fois arrêté sans papiers mais sous cinq identités différentes. Le tribunal expédie l’individu pour trois ans hors de France, et ses quatre autres identités avec lui, et c’est bien lui qui écope de trois mois de prison ferme avant sa reconduite à la frontière, pour aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irrégulier d’étrangers en France.

Le chinois et ses variantes, le vietnamien, le roumain, le portugais, l’allemand, le polonais : la tour de Babel. Une tour que pour rien au monde ils veulent quitter. Tous les stratagèmes sont bons pour éviter le refoulement hors de France. Le tribunal apparaît comme l’antichambre de la menace. Condamné, c’est l’idée de la mort qui rôde, acquitté, c’est revivre.

Avant de réussir enfin sa traversée, une constante : échapper, pas le plus longtemps possible, mais toujours, à la police de l’air et des frontières sur tout le territoire, aux policiers en ville, aux gendarmes. Les aires d’autoroute sont fermées, il ne reste qu’une tactique, approcher des abords de Calais et chercher des solutions de passage pour l’Angleterre tout près des points de contrôle, avec le risque accru pour les migrants de se faire prendre. Alors la fuite est un choix vite fait. Mais elle s’arrête parfois brutalement au canal qui ceint la Citadelle avec la mort en point final. Les plongeurs de la brigade nautique n’auront d’autre peine que de repêcher le noyé, passeur ou pas. Un de plus.

Les migrants migrent, dans tous les sens, comme des fourmis complètement déboussolées à la suite d’un coup de pied qui a pulvérisé la fourmilière et ses repères. Les plus pragmatiques se disent que l’essentiel est d’être et de rester en Europe. Après tout, qu’importe le pays ! Belgique, France, pourquoi pas l’Espagne ? Ils veulent juste vivre, essayer d’oublier leur pays natal et la pression talibane qui les condamne définitivement à mort pour n’y avoir pas cédé et avoir opté pour la fuite. Une poignée d’entre eux se résigne à pousser la porte du centre des réfugiés. Qu’ont donc à leur proposer le Haut Commissariat de l’ONU pour les réfugiés et France Terre d’asile ?

Veulent-ils devenir Français puisque la Grande-Bretagne ne veut pas d’eux ? Certains ne savent pas qu’ils peuvent déposer une demande d’asile. On leur expliquera les procédures, bien, mais trop de directives officielles gripperont bien vite la machine à peine lancée ! Sont-ils déjà identifiés dans un autre pays d’Europe qui alors est désigné pour les guider et vers lequel ils ont l’obligation de retourner ? Sont-ils vraiment prêts à vouloir vivre en Europe et à n’avoir aucun regret de l’Afghanistan ? N’ont-ils point laissé d’attaches fortes là-bas ? Leur vie sera-t-elle en danger s’ils y remettent les pieds ? Mesurent-ils les obstacles à une vie ici : la langue, le manque d’argent ? Ont-ils des diplômes, question sournoise et réponse à double tranchant ? Non, et l’insertion risque bien de capoter très vite dans un pays en proie à des difficultés économiques et au chômage, oui, et le pays d’accueil va se voir accusé d’organiser une fuite des cerveaux à son profit ! Ils ne sont pas vraiment désirés ! Les règles de vie sont si différentes !

Pourquoi ne choisissent-ils pas de rentrer au pays ? Comme ils ont tout perdu, ont tout investi dans leur trajet vers l’Europe, plusieurs milliers d’euros leur sont promis pour se réinsérer chez eux. Ils soutiendront financièrement leur famille. Ils expliqueront à leurs compatriotes que l’Europe n’est pas le paradis qu’on leur promet.

Bien sûr, ils devront mesurer les risques pour les dettes dues aux passeurs, entre autres. Un retour idyllique ? Les Talibans qu’ils ont fuis les attendent et ils apparaîtront comme des traîtres, surtout si en plus ils ont travaillé pour des organismes européens ou américains.

Il y a ceux qui ont bu les paroles des passeurs qui cachent une large part de vérité et qui donc se persuadent que le Pays Merveilleux se situe toujours outre-Manche. Parmi eux, les plus prudents choisissent la solution d’attente et de repli vers l’intérieur et les zones de campement que parfois ils ont connues dans les bois de l’Audomarois, entre Longuenesse et l’autoroute A26, bien isolés pour ne pas ameuter les habitants des villages environnants, et même au-delà vers la frontière belge, délaissant la bande côtière trop fréquemment ratissée.

Les désabusés, ceux qui ne croient vraiment plus à un possible passage en Angleterre en cherchant une planque à Calais dans tout ce qui transite vers la Grande-Bretagne, visent plein nord vers les ports belges tels Ostende ou Zeebrugge.

La première, la touristique, donne l’avantage aux illégaux (ainsi sont désignés les migrants en Belgique) de se cacher relativement facilement, en cette fin d’été, dans des maisons vides ou des résidences secondaires inoccupées en basse saison, ou de dormir dans le grand parc du centre-ville tant que le temps d’automne n’aura pas vaincu la clémence estivale qui s’attarde.

Huit liaisons quotidiennes avec Ramsgate : les ombres qui se veulent en transit reprennent espoir et se convainquent que la fin des vacances laissera des places à prendre clandestinement sur les ferries. Leur disparition sera bien vécue par le commerce local qui estime que la présence de ces étrangers nuit au tourisme. De surcroît, en septembre, les contrôles policiers se font moins pressants : on craint moins pour le portemonnaie des promeneurs. Profonde injustice pour les migrants, car ils ne sont pas des pickpockets. Ces vols à la tire sont le fait d’individus qui, de par leur physique passe-partout sur la côte flamande, se fondent, tels des caméléons, dans la foule des estivants, mais qui supportent sans la moindre mauvaise conscience que ces méfaits soient mis au compte des étrangers.

Les plus pressés gagnent Zeebrugge sitôt leur entrée en Belgique, non pour s’y faire discrets, s’y dissimuler ou s’y loger, la ville portuaire n’offre pas un grand nombre de caches, mais pour prendre le risque d’une traversée qui ne se terminerait pas comme toutes celles qu’ils ont ratées à Calais, même si elle est beaucoup plus longue et les conduira loin du sud de l’Angleterre. Tant pis, pourvu que le chemin mène à Londres, même en zigzaguant ou avec de nombreux détours. D’autant que les structures d’accueil qui les hébergent et les nourrissent n’ont pas les capacités de leurs homologues françaises et sont saturées, sans aide du ministère de la Santé et d’associations caritatives qui ne veulent rien faire. Le temps presse !

Ceux qui ont encore quelques sous pour se payer des complicités qu’ils négocieront au calme parient pour le sud, vers la capitale française, histoire de se faire oublier et de voir la tournure des événements. Paris leur offre une palette de subterfuges plus diversifiée pour pénétrer en Angleterre, du moins s’accrochent-ils à cette idée. Il est sûr que leurs tentatives seront étudiées, programmées, mises au point pour approcher du risque zéro de se faire prendre. L’improvisation n’est généralement pas de mise quand les migrants entreprennent depuis la région parisienne un essai de passage. Les moyens ont un prix de revient plus élevé et le montant de la note à régler aux passeurs réserve l’entreprise aux plus fortunés, ou à ceux qui s’engagent pour longtemps dans une dette d’honneur.

L’aide des bénévoles et des associations s’arrête aux besoins immédiats. En faisant davantage, elles seraient visées par le délit de solidarité qui les exposerait à de fortes amendes. Pour l’heure, les abords de la gare de l’Est et du canal Saint-Martin saturent. Les squares Villemin et Eugène-Varlin n’ont plus assez de bancs pour voir s’asseoir les exilés afghans. Les trottoirs de la place Raoul-Follereau débordent de migrants aux regards vides qui n’ont qu’une envie : s’allonger, éreintés qu’ils sont. Juste un coin pour la nuit. Demain, ils verront !

Et puis il y a ceux qui ne veulent pas lâcher l’affaire, qui n’en ont pas bavé pendant des mois et des milliers de kilomètres, qui se disent qu’ils n’ont plus rien à perdre et qui vont tenter une dernière fois de gagner l’Angleterre. La rumeur court, est-elle fondée ou non, mais c’est ça le propre de la rumeur, que durant une semaine, avant le grand matin, la chasse aux tentatives de traversées clandestines se fera plus calme, moins agressive et moins acharnée, comme si les autorités laissaient une ultime chance aux errants de tous poils, et que de l’autre côté du Channel les regards pourraient se faire moins observateurs. La rumeur, si elle détruit souvent, elle met du baume au cœur parfois ! Au fil des heures, de jour comme de nuit, la zone des Dunes se vide et fait place à un bidonville trop spacieux pour le reste de ses occupants. Tous s’en vont, non, presque tous serait plus exact, car il y a des ratés dans les réussites. Bien des gars reviennent le regard penaud et la mine déconfite !

Train, shuttle, bateau : rien d’autre ! Passer, ou pas, ça tient à trois fois rien : un chauffeur qui s’engueule au téléphone avec son patron parce qu’il en a marre de faire des heures supplémentaires qu’il a bien du mal à se faire payer, et hop un trou sur le dessus de la remorque, le coup est parti. Un autre rongé par la jalousie parce qu’il se doute que sa femme partage son lit avec le voisin dès qu’il a les talons tournés et qui ne fait pas trop attention au fret qu’il convoie vers le vert et pluvieux Connemara. Qu’est-ce qu’il en a à foutre ! Et hop, trois ombres qui se contorsionnent telles des serpents dans son chargement. Plus vicelard, le troisième, il les a vus, les gaillards, s’enfermer furtivement dans le container qu’il tracte ! Rira bien qui rira le dernier ! C’est en sifflotant qu’il passe le contrôle, avec succès ! trois coups d’accélérateur, trois mètres. Stop ! « Je freine, je descends ! Eh, vous les douaniers, je fais de l’index, venez voir. Ben alors, de la merde dans les yeux, pas foutu de faire votre boulot, et c’est moi qu’on va coffrer à Douvres. Faites chier ! Et hop, vous les bronzés, cette fois c’est loupé, foutez le camp dans votre jungle de pouilleux ! » 

Autant de réussites et d’échecs que de zizanie dans les familles des surveillants des liens transmanche ou des camionneurs ! Dire qu’Ahmed devra son passage au bordel qui règne dans une famille slovaque de Bratislava et Rachid annihilera son odeur de mal lavé dans les jasmins de la Riviera !

N’empêche, un simple coup de fil à une bénévole qui a fait la tambouille pour eux durant tous ces mois : « C’est bon, ils sont de l’autre côté ! » « C’est sûr ? » « Tiens pardi, la preuve : on roule à gauche ! »

Hafizullah, lui, voit toujours rouler à droite !

Le premier soir, tunnel. Pas la peine d’y compter. Plus personne ne cherche la faille dans le secteur depuis belle lurette. Les trains sont inaccessibles et le tunnel infranchissable. On y est tout de suite repéré ou sinon bientôt écrabouillé !

Le deuxième soir : le port. Des bateaux, c’est sûr, les admirer, c’est oui, monter à bord, c’est non. Il faudrait des complicités que Hafizullah n’a pas. Son compagnon tronçonné à Loon-Plage n’avait dans sa naïveté pas mesuré tout ça. On n’embarque pas simplement en claquant des doigts. De plus, en dehors des ferries, aucun n’a un port anglais comme prochaine destination. Un passager clandestin pour un port du bout du monde, c’est, une fois découvert, un banquet pour les requins !

Troisième soir !

 


Date de création : 22/11/2011 22:08
Dernière modification : 09/06/2018 10:56
Catégorie : Kaboul ... Thé ! Calais ... Café !
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REALITE A VIVRE ...

Une fessée d'amour

pour Tequila

Extrait n° 1

...

Et alors il me regarde.

Moi aussi. Un chat, quand ça ne connaît pas, c’est méfiant ! Ici, tout est différent.

Les cercles de mon engin sont de plus en plus amples. Le chat me suit des yeux. Le moteur poussé à fond fait un boucan d’enfer, l’animal ne manifeste aucune peur. Je passe près de lui, nous échangeons un coup d’œil complice, et alors j’entreprends un ultime parcours sur les bordures du jardin potager.

Doucement le chat se lève, fait le gros dos, emprunte dans l’autre sens le trajet de son arrivée et s’éclipse tandis que je baisse le régime du moteur.

J’avais envie de l’approcher, c’est raté.

Je ne sais même pas par où il est passé.

...

 

...

 

Extrait n° 2

 

La touffe de poils n’a pas bougé pendant que je l’observais. J’ai alors envie de partager mes interrogations à son sujet et je vais chercher mon épouse.

— Regarde ! Il y a un mois, quand je retournais le jardin… tu t’en souviens, je te l’ai raconté ! J’ai l’impression de voir le chat qui m’observait.

Il a doucement levé la tête. Est-ce notre présence qui l’a alerté ? Nous nous tenons tranquilles, à plusieurs mètres de lui. Il n’a pas bougé de place. Il nous regarde, nous juge, nous jauge. Il redresse le corps et, continuant de nous fixer, il nous adresse un miaulement.

Je continue :

— C’est le chat qui s’est assis un moment sur une planche du jardin, près de moi, pendant que je travaillais le terrain.

— Il a l’air tout jeune.

— Il semble vouloir nous dire quelque chose.

J’enlève sans précipitation la chaîne qui interdit l’accès au terrain après avoir déverrouillé le cadenas qui la maintient, et nous amorçons notre approche.

La petite bête nous observe et nous manifeste de la méfiance. Elle se tient sur ses gardes, nous nous arrêtons. Elle va fuir si nous poursuivons vers elle.

 

...

Extrait n° 3

 

Pas le moins du monde dépaysée, la minette. De toute évidence, elle vivait près de gens, avec des gens. Ce n’est pas une chatte qui court les caves, les haies, les gouttières ou les hangars agricoles pour manger et dormir.

Bien sûr ! C’est gagné !

La chanson devient de plus en plus répétitive : « Mardi matin, lala , la chatte et… sont toujours chez moi pour… »… Et elle est profondément endormie, recroquevillée, dans son baldaquin de fortune. Et pour quelques heures encore !

Elle s’incruste et au fil de la journée s’insinue l’idée que nous en avons la charge, comme si elle devenait petit à petit notre propriété et que nous en aurions la responsabilité. Non, cet animal, nous voudrions bien qu’il retrouve ses maîtres !

Pour aujourd’hui la chatte ne se laisse pas encore trop approcher, encore moins toucher, et nous lui accordons le temps de s’habituer.

Cependant, dès qu’elle est éveillée, elle se lèche, elle se gratte, s’égratigne, se met à vif la tête, la nuque, le cou, le dos, la queue. Son pelage est mitraillé de trous.

Ce mercredi nous laisse désemparés. Il n’est pas possible d’apporter le moindre soin à notre malade. C’est à peine si au cours de la journée nous pourrons la frôler, maîtrisant nos gestes qu’elle ne doit pas interpréter comme des menaces.

 A suivre.

...

Extrait n° 4

 

Courant maladroitement en
traversant la pelouse la première fois, mieux organisé
et habilement dissimulé derrière d’épais buissons de
fleurs qui bordaient l’eau la deuxième fois, il s’apprêtait
à faire un copieux repas. A moins que sa dégustation
n’ait commencé avant notre mise en alerte ? Les cris
menaçants et les gestes rageurs de la famille eurent
raison de l’importun qui fut dans l’obligation de prendre
un envol laborieux sur une piste un peu courte. La
troisième fois, il resta haut perché sur le faîte d’un saule
et ne prit pas le risque d’atterrir.
Nous ne prîmes pas de risque non plus et le filet fut
installé.
Au travail donc !
Le haut du grillage mitoyen s’agite, pris de
tressautements. Un « frout, frout » sec et soudain, le
lierre s’entrouvre comme fendu par l’éclair. Une touffe
trépigne en basculant vers moi.
Deux yeux, deux oreilles, quatre pattes, une queue, le
tout en noir et blanc, qui souffle en amortissant sa
dégringolade sur le muret fleuri.
Je suis sur le côté opposé du bassin. Plusieurs mètres.
C’est le déclic instantané dans mon esprit, et j’ouvre
sans doute une bouche toute ronde, aussi ronde que
mes yeux ébahis. Même les poissons ont été surpris,
des vaguelettes nerveuses se propagent en cercles qui
s’entrecroisent.

« Bonjour, c’est moi, Minette. Me revoilà. Ah ben oui,
cela fait cinq mois, d’accord, mais bon ! »

A suivre

 

....

Extrait n° 5

— Le pharmacien a oublié le fusil à lunettes et la seringue hypodermique. Ce n’est que de cette façon que nous parviendrons à soigner « notre félin ».

Je juge sage d’attendre le lendemain pour le lait. Une noisette de crème sur la pointe de l’index et du majeur gantés. L’opération est réalisée en cachette.

Pendant que la chatte mange, j’écrase avec toute la délicatesse possible l’onctueuse boule blanche sur la plaie la plus importante du dos. Elle s’est déjà esquivée.

La notice pharmaceutique conseille, pour que le soin apporté ait davantage d’efficacité, de couper ou de raser les poils autour des lésions. Impensable dans le cas présent.

Les applications ne donnent donc aucun résultat notable et la dermatose s’étend sur le dos mité et l’abdomen pelé. Nous avons au niveau du contact avec notre protégée obtenu un effet inverse : Minou ne veut plus manger tant que nous sommes présents et trop proches d’elle. Nous représentons maintenant une menace.

Tentons le collier antipuces.

L’acheter, c’est vite fait. Il reste à l’installer. Minette ne collabore pas et refuse toute approche,  elle a compris que notre comportement cache quelque chose. C’est par surprise que je lui passe le collier sous le cou, saisis la pointe à l’opposé et la glisse dans le premier côté de la boucle. La bête ressent ce carcan comme un corps étranger dont elle veut se débarrasser. Elle essaie de l'ôter, glisse une patte entre l’intrus et son cou et tire avec une grande violence, mais rien n’y fait.

A suivre

 

   

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